Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

Publié le par Equipage Contre-Temps

Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

Ou

Oups ! La mousse est grave à la bourre.... juin à juillet 2016

 

 

La mousse, vous l’avez vu de vos yeux vu, en fait, est une bulleuse fainéante paresseuse indolente... Paroles, et paroles et paroles ... « c’est normal, c’est une fille », dirait le capitaine….

Rien qu’elle a écrit, rien de rien…. C’est pas qu’elle avait rien à dire depuis le mois de mai – 7 mois, p... déjà 7 mois !-, vous la connaissez, elle en dit toujours trop, à trop de monde, avec une foultitude de mots. Mais l’hiver est passé sans que l’équipage ne s’en rende compte...et la mousse encore moins...

 

La dernière fois que vous avez lu sa prose, l’hiver arrivait, les nuits se rafraichissaient un peu, la houle grossissait… et nous voilà en décembre, c’est Noel et bientôt le Jour de l’An et on est en plein été !

Arrrrrrrrrrrrrrrrrrggggggggggggggggggggggggghhhhhhhhhhhhhhh…..

 

La saison des pluies tarde à arriver, même si on a quelques pipis d’oiseaux par ci par là qui arrosent à peine les fleurs et ne font même pas grossir les rivières, le ciel est gris chaud d’acier, le vent souffle par rafales puis disparait derrière la montagne, la mer est plate, bleue transparente, à y voir le fond de sable à 8 mètres, la baie est petitement pleine d’une vingtaine de bateaux qui « font » les Marquises en 15 jours top chrono et les mouillages de Taipivai et de Hooumi sont d’une platitude sereine,

Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

les mangues coulent des branches, les ananas de sucre, tandis que les langoustes barbotent dans les trous …

On va pas dire qu’on s’habitue, non, disons plutôt que ça a le charme du déjà vu revisité, avec un gout de reviens y, et ici, de toute façon, rien n’est jamais tout à fait pareil, tout est toujours différent – c’est pas de la mousse ça, mais c’est pas mal, et ça dit ce que veut dire la mousse, ça tombe bien, non ?! –

 

Mais ne nous emballons pas, entre mai et décembre de l’année qui vient de finir, il s’est passé quelques jolies choses et il est arrivé de belles rencontres…

La mousse passera volontairement sous silence ces heures inestimables pour son cerveau et la caisse de bord qu’elle a employées à travailler - Oh !- .

Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

Elle préfère, pour se faire pardonner son silence – et ceux qui pensent que ça leur a fait du bien ne moufte même pas un seul mot, sous peine de représailles sévères, attention, gaffe à vous ! – elle préfère donc, écrivais-je t-elle, vous envoyer quelques images pour ravir vos yeux, et réveiller vos envies de beau, de gentil, et d’aimable, à aimer donc …

Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1
Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

Review : Cette année, le « Juillet » a été une façon pour les troupes qui ont participé au Festival de décembre 2015 de montrer aux habitants encore plus que leurs talents : la compétition les a-t-elle particulièrement poussés, des ambitions se sont-elles révélées ? Les chefs de danse ont été, en tout cas, particulièrement exigeants et, nous, on s’est vu combler !

On a admiré des danses reconstruites autour de légendes nouvellement mises en scène avec beaucoup d’émotions ! Le bateau copain Tiki, habité par un couple franco- chilo-allemand, ou allemand-franco- chilien si vous voulez, le capitaine du Tiki, donc, a fait de magnifiques photos….

C’est lui, non, pas elle, lui, le grand à moustache….

Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

Allez, on vous montre….

Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1
Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1
Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1
Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1
Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1
Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1
Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1
Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

Contrairement à ce qu’on peut voir à Tahiti, aux dires des copains qui sont là-bas - les pauvres ! -, le « Juillet » des Marquises n’est pas destiné à un public de touristes, comme celui des Gambier d’ailleurs, vu que là-bas, on était 10, des ahohe – étrangers- …Les ahohe, aux Marquises, en plein hiver avec la houle qui rentre dans la baie et qui passent sur le petit quai, les ahohe, donc, sont une petite trentaine à regarder les prestations, dont la mousse et son capitaine mais pas le chien qui reste au bateau parce que les pahu ils aboient dessus mais pas en rythme et les danseurs, qui sont du coup, perturbés!

Les marquisiens, bien plus présents que l’année passée, viennent, eux, constater et critiquer le travail réalisé, la qualité de la transmission du sens…et participer.

Les petits sont les premiers à intervenir et à s’intégrer dans les troupes, pourtant chorégraphiées de mains de maitre. Vu les sourires et les encouragements des grands, ils ne s’en sentent que plus portés par la confiance qu’il leur est donnée….

Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1
Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1
Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

La mousse se demande, comme ça, en passant, si cela ne serait pas un truc que l’éducation nationale pourrait prendre à son compte comme pratique pédagogique …. Mais bon, la mousse elle dit ça, elle dit rien – spéciale dédicace à Laureline – na, na, na ! ! !

 

Il faut aussi dire qu’ici, au 14 Juillet, il n’y a pas de militaires, mais des défilés de chevaux, les associations sous regroupées sous leurs drapeaux et des pompiers volontaires qui se trompent en faisant un demi-tour droit ! rien à voir avec les Champs Elysées, non ? nous, on préfère, et vous ?

 

Pour clore le « Juillet », la mousse vous propose quelques clichés insolites….

 

La culture marquisienne est vivante, la preuve….

Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

Madison est la copine de la mousse. Quand la mousse vient papraquer en fin de journée dans la boutique dont s’occupe Madison, les « ma chère », « madame », « très chère » fusent, surtout quand de jeunes hommes, rasés de près, en chemise blanche et pantalons noirs, chaussures vernis, mallette en bandoulière et prénom inscrit sur le badge, toujours porté à gauche sur la poitrine, - des mormons qui cherchent à recruter – oups pardon, à porter la bonne parole ! – mais où que j’en suis ? ah oui, surtout quand de jeunes hommes, sont là, penchés en avant, à chercher des piles ou un journal posé en pile au ras du sol -hein, hein !- :

« trop jeune » commente la mousse,

« bien tendre » répond Madison,

« tout à leur apprendre » ajoute à la mousse,

« tout beau, tout neuf ! » déguste Madison en se léchant les lèvres….

Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

Une petite en plus : lors du dernier mariage qui a eu lieu à Taiohae, juste avant la Noel, Madison est habillée d’une magnifique mini robe, genre Chanel, mais noire. Couleur tout à fait inhabituelle ici, voir inconnue. La mousse s’en étonne… Madison de répondre « je suis en deuil, ma sœur, il se marie ! »

 

No comment, vous ne connaitrez pas le nom du marié….

 

 

Et puis, une petite séquence émotion !

Peut-être vous souvenez vous du petit piou piou qui l’année dernière, avait emballé les foules de Taiohae lors du « Juillet »….

Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 1

Voilà, aujourd’hui, il vit dans la Creuse, son papa ayant été muté pour d’obscures raisons gendarmesques….

Pour clore ces retrouvailles épistolaires ou presque, la mousse vous fait partager ses réflexions, suite à une discussion que l’équipage a eue avec les très chers Evazion, René et Maryse, copain bateau, aujourd’hui au chantier de Raiatea pour préparations de la suite de leur tour du monde, vers les Cooks et la Nouvelle Calédonie.
Il s’agit, sur le fond d’un échange sur le rapport rêve / réalité que l’équipage a aussi partagé avec François et Edwige, chers zamis de loin à qui on pense super fort, surtout en ce moment – spécial dédicace et truffe de Sika, comme vous dites !-
Pour Maryse, si on la cite à peu près dans le texte « la Polynésie, et les Marquises, surtout sont une vraie déception qui l’a rendue véritablement malade – elle a chopé tout ce qui passait et rien n’est passé vite ! - Elle avait tellement fantasmé la Polynésie qu'elle ne s'y est pas retrouver, son rêve de 30 ans s'est brisé et elle en veut à la terre entière, notamment à ceux qui sont venus ici en bateau et qui n'ont pas raconté « la vraie réalité » et qu’on ne vienne pas lui dire que les polynésiens sont gentils, ils tapent sur tout ce qui bougent, boivent comme des trous, etc. »
Difficile de lui faire entendre que chacun a sa réalité et sa vision du monde, que ses déceptions sont des enthousiasmes pour d 'autres, etc., etc.

Que dire de « notre réalité »?
Pour l’équipage, la vie aux Marquises, depuis presque trois ans, est une succession de chocs : esthétique, humain, géographique, gastronomique, odorant, animalier, et tout et tout...
Pour l’équipage, ici c'est le « chez nous » qu’il cherchait sans vraiment l'avoir décrit, ce qui, visiblement, est un plus.... Il n'y a que des surprises, bonnes, curieuses, étonnantes mais jamais encore mauvaises...

Oui, pour l’équipage aussi, les Marquises sont brutes : les mouillages sont précaires et jamais sûrs pour une saison entière, la mer est bleu foncée, les ancres balancées à 10/15m de fond, et difficile de trouver des eaux claires pour snorker, - en fait, il y a plein d'endroits mais notés nul part!-. Le temps est capricieux et tellement difficile à prévoir. Les prix sont les mêmes qu'en France sauf si on mange local, la terre ne se vend pas. Les marquisiens sont des iliens et non pas des marins, ils n'ont pas besoin des touristes, pas envie des voiliers en grand nombre qui ne font que passer, ils sont durs à la tâche, durs avec les femmes, avec les ados, avec les chiens, ils boivent comme des trous sans fin, à se rendre minables et violents. Les balades sont souvent des grimpettes au milieu des herbes folles. Les maisons sont de tôles et de planches de contreplaqué récupérées. Les bœufs et les biquettes sonores et maitres des chemins. Le travail est difficile à trouver parce qu'ici, rien ne se fait, ne se dit, rapidement ; il y a des alliances à respecter, des temps nécessaires à accepter et la bonne volonté et l'envie d'aider ne suffisent pas pour déclencher les actions....et l'inventaire pourrait continuer....
Ici, pas de vahiné qui dansent le tamure, pas d’accueil avec tambour et folklore, pas de carte postale....

Du coup, on peut comprendre que la réalité ne soit pas à la mesure des rêves pour certains... mais pas pour l’équipage.... on n’avait pas rêvé... une chance, surement!
On est devenu plus terriens que marins, passant des heures à traverser un village, à rester à boire des coups chez des marquisiens toujours souriants et prêts à dire, comme ça, en passant, que le français n'est pas la langue des marquisiens et qu'ici, le terre des hommes est tolérante mais pas idéale...
On apprend, on est humbles, visiteurs attentifs, à l'écoute et avec peu d'arguments à opposer à la colonisation subie depuis le XIXème siècle et au mélange de croyance dans le mana et en ce Dieu catholique, très prégnant - trop pour l’équipage qui abhorre ce préchiprécha!-...
On discute avec quelques-unes des femmes maltraitées, souvent battues mais qui ne portent pas plainte « à cause de la famille », avec des enfants qui, dès 11 ans, sont dans des obligations de travailler à la maison comme des adultes mais traités comme des « rien », on caresse des chiens qui ne sont pas nourris et tapés parce qu'ils sont simplement là....
On exprime nos refus de ces situations mais nos propos sont souvent reçus avec des regards interrogateurs : quel est le problème?
« Tu tapes jamais sur Cécile ? non ?! tu devrais, comment elle sait que tu l’aimes alors ?»
On montre aussi d'autres façons d'être, de faire, grâce à la relation que l’on a - on nous appelle les zamoureux"-, grâce à Sika qui fait ses tours avec un bout de banane ou de mangue comme récompenses sans jamais une trace de coups... on fait sourire, et quelque fois, on surprend et quelque autre fois, des discussions s’entament, furtives, une phrase, un mot, un regard... On essaie de ne pas juger, on pose des questions pour comprendre, on donne des exemples de « faire autrement » mais parfois, on rompt la relation parce que trop difficile pour nous ....

Bon, maintenant, et après tout ça, y’a qu’une seule conclusion valable : si vous voulez avoir votre propre réalité des Marquises et des marquisiens, y’a plus qu’à venir ici, vous savez où coucher, cabine à bâbord à disposition ….
 

 

Allez, perdez pas la vue et la main, la suite dans le Cahier de bord : Nuku Hiva décembre 2016 partie 2 à suivre !

 

Quelques brèves, comme ça….

« Ici, les conneries, c’est comme les légendes, elles sont vraies ! »

« Tu as des enfants ? », « Oui », « Alors, tu as accompli quelque chose »

« La nuit, les morts sont plus près que le jour »

« Tu crois que je peux faire un gros emprunt ? », « pour faire quoi ? », « comme ça, pour embêter la SOCREDO » - banque polynésienne -, si je meurs, personne peut rembourser, on a les sous et on rembourse pas ! », « t’es marié ? », « oui », « ben ça marche pas alors, ta femme elle devra payer même si t’es mort », « ah bon ! »

« Pour apprendre les prières, j’étais attaché à la cheville, comme les cochons », « mais qui te faisait ça ? c’est dur quand même », « c’est ma grand-mère, c’était une forte femme, j’ai appris mes prières »

Publié dans Cahier de bord

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article