Cahier de bord, Juillet 2021 : les brèves pas brèves et un peu plus...
Ou
Les brèves pas brèves, pour sourire dans ce monde de brutes qui est peut-être le vôtre…
en tout cas, plus le nôtre…
Après un long silence écrit – ah ba non, ne croyez pas vous débarrasser des bavardages incessants de la mousse comme ça, non mais non alors ! - , après un long silence écrit donc, la mousse pourrait avoir des tas de choses à vous raconter :
- les travaux qui s’enchaînent sur le Contre-Temps, avec l’absence habituelle du SAV de Fountaine Pajot, évidemment…
- l’arrêt total des activités professionnelles du bateau d’hôtes, qui fait dire à l’équipage que :
- la caisse de bord prend l’eau
MAIS
- la vie en autarcie est vraiment agréable !
- les aides de l’Etat bien venues pour l’ensemble des marquisiens, et polynésiens plus généralement, qui font de nouveau croire que la Polynésie française n’est pas un pays « à l’étranger » comme le classe la Sécurité Sociale et les taxes douanières,
- la visite du Président de la République en Polynésie, avec une étape de 2 jours aux Marquises, à Hiva Oa, où :
- toutes les iles ont envoyé une délégation de 100 à 250 personnes
- l’accueil a été incroyablement chaleureux et amical
- les marquisiens ont été heureux et fiers de l’effet produit sur « Emmanuel » - et certainement aussi sur les officiels tahitiens venus en nombre aussi
Et un discours du Président très attendu sur le « fait nucléaire » comme on dit ici …
Alors, le 27 Juillet, il affirme, notamment, «la part d’ombre et de doutes sur le fait nucléaire », il « reconnait l’existence d’une dette de la France vis-à-vis de la Polynésie française », explique que « les tirs aériens, on ne peut pas dire qu’ils étaient propres » et promet « la transparence et la vérité aux polynésiens ».
Il ajoute que la France « a payé des tas de gens, on a payé des tas de choses, mais on n’a pas payé les victimes, pas assez », et « que c’est l’argent du contribuable hexagonal et qu’il l’assume ».
Les journalistes commentent « c’est mieux que le président précédent, mais pas encore assez pour les associations qui militent sur ce dossier depuis plusieurs années... Elles attendaient que le Président demande au nom de l’Etat « le Pardon des polynésiens », le Président a demandé au peuple polynésien « de pardonner la France pour ce qu’elle leur a fait »…
D’un côté du ring, on a donc le sens biblique du Pardon et le temps arrêté à 1966 ; de l’autre , le représentant de la République laïque qui ne veut pas refaire l’histoire du nucléaire, façon de Gaulle et qui vise l’avenir de la relation entre l’Etat et la Collectivité !
Comme arbitre, on pourrait avoir l’historien local Jean Michel Regnault qui explique « si Emmanuel Macron doit demander pardon alors, tous les hommes politiques polynésiens encore vivants qui ont validé l’installation du CEA à Mururoa, tous les médecins, militaires notamment, tous les journalistes qui ont validé les informations officielles, tous les entrepreneurs qui ont fait fortune, tous les financeurs locaux qui ont ouverts les lignes de crédit etc. doivent aussi assumer et demander pardon et là… »
Force des mots et sens des maux…
La mousse vous laisse réfléchir à tout ça, sans prévenir les gilets jaunes, qui seraient mortifiés d’apprendre ce que l’Etat donne à la Polynésie chaque année depuis …, ni les anti Macron primaires, et encore moins les détenteurs des théories complotistes en tout genre, au risque de vous faire luncher… Et pour plus de clarté, vous pouvez aussi regarder « Les témoins de la Bombe », collection de plus de 30 témoignages recueillis en 2010 dans le cadre du programme « Mémoire de la période CEP » de la délégation polynésienne pour le suivi des conséquences des essais nucléaires. Réalisation Arnaud Hudelot. Coordination Bruno Barrillot - John Doom », « Copyright Mémoire et Images, Tous droits réservés » https://www.youtube.com/.../UC55pk_S4cWmeLeQkl4oiF3Q/videos
Voilà, la mousse aurait pu vous raconter tout ça…
Mais, depuis 7 ans que l’équipage du Contre-Temps habite aux Marquises, il a d’autres choses à partager avec vous, si vous le voulez encore… après tout ce chalala ! ! ! Parce qu’il a toujours autant de plaisirs à écouter les pensées des polynésiens qui chavirent la langue française comme les vagues bousculent les coques de coco, sans jamais les faire couler…, l’équipage prend en notes, encore et encore, ces jolis mots qui disent tant de l’art de vivre ensemble, ici…
Alors, en ces temps souvent empreints de brusqueries, de déchainements verbaux et de méchanceté, les Contre-Temps ont décidé de partager avec vous, pauvres habitants de pays gavés de grandes surfaces, d’échoppes de téléphones mobiles, de décorations d’intérieur et de chaussures, les Contre-Temps ont décidé de partager avec vous, donc, une petite bouffée de fraicheur et de bienveillance ; et à ceux qui vivent loin de ces bazars surréalistes, l’équipage vous embarque au cœur d’un monde qui vous est familier, heureux que vous êtes !
Entendus à la radio La Polynésie la 1ere, au snack, sur la route, au point d’eau propre…
A propos de la langue
« Tu veux parler reo Tahiti ou reo Molière ? » (le tahitien ou le français)
« Juger par défaut, c’est quand il y a un défaut dans ton bon droit »
« Inimaginaire »
A propos de la politique
Un ministre a parlé à la radio ce matin, un auditeur commente :
« C’est un disque qui tourne, parler c’est une chose, mais actionner, c’est autre chose »
« Les missionnaires nous ont appris à lire les yeux fermés »
« Nous sommes la dernière roue de la carrosserie » dit un marquisien à propos du pouvoir central de Tahiti
Un homme politique connu en Polynésie est décédé ; il était le maire d’une grosse commune de Tahiti. Il brillait son 8eme mandat.
Une dame qui assiste à la 1ere veillée funèbre est interrogée :
« Tu as une anecdote à raconter sur lui ? »
« Ah oui alors, on peut dire qu’il aimait vraiment les femmes ; il aimait beaucoup les femmes. Il les aimait tellement, qu’il a fait des BB un peu partout ! »
« Ma tête rentrera toujours dans le même chapeau après l’investiture de maire »
Le président de la République vient 4 jours en Polynésie française. Au bord de la route, un homme lui dit :
« Tu as bien fait de venir sans Brigitte, ici il y a plein de femmes »
A propos de la météo
« Coup de vent à Tahiti. Le bilan n’est pas humain »
« Le soleil est nuageux aux Iles sous le vent »
A propos de manger et boire
« Un pot de gelée à la marmelade »
« Je suis un fin gourmand »
« Mon mari plonge de la langouste, c’est 2000 FP le kilo pour ceux qui s’intéressent »
« Il me faut une licence pour les boissons alcooliques »
« C’est quand la saison des goyaves ? »
« Quand il y en a beaucoup, on ramasse ! »
A propos des souvenirs d’enfance
Une dame raconte qu’à l’école, quand elle était petite, il y a eu la visite d’officiels de métropole
« C’était un ministre, je me souviens pas le nom, il était à l’Annapurna. Il a été à la neige… »
« J’avais une voiture Ami8, tu sais les voitures à ressorts ! »
« Quelqu’un savait ramasser le miel sauvage ? »
« Oh oui, et ils prenaient des conséquences, ils revenaient avec le miel et une chirurgie esthétique au visage »
« Papa éduquait ses garçons à la très dure ! »
« Il a commis une faute de tendresse, il m’a licencié parce qu’il a compris que je voulais pas travailler au restaurant avec lui mais je voulais retourner à l’imprimerie » raconte un fils à propos de son père.
« Il faisait la mécanique, on le payait en bière » dit une fille à propos de son père
« Je ne travaillais pas, j’étais militaire expatrié »
A propos de la vie quotidienne
Un incendie qui atteint 3 maisons dans un quartier surpeuplé de Papeete. Une dame témoigne :
« J’ai eu peur, les flammes ont léché mon père ! »
« On est devenu copains cochons »
« Une gazinière électrique »
« Y a des gens qui sont rentrés chez moi par infraction »
« J’ai des piquements sous les pieds »
« Il a été lui raconter la fleurette »
« J’ai été radié de tik tok, et là, j’ai perdu ma vie »
A propos du travail
« Je suis repu de travail »
« Il ne faut pas laisser ces personnes travailler dans le noir » (au noir)
Un artisan de Fatuiva, Temo, va chercher son bois loin dans la forêt, il dit :
« Tu ne peux ramener que ce que tu peux porter sur le dos »
Adolphe, très cher Adolphe, 83 ans, qui fait pousser sa vanille devant sa maison
« On plante pas avec la bouche »
« Y’en a qui ont pas les pieds sur la mer » ( pieds marins)
A propos des femmes
« Aider sa femme, c’est une charge supplémentaire et c’est pas rien »
« Celle-là, elle fait un trou pour faire tomber les (hommes) marquisiens dedans, après tu peux plus en sortir et tu es dans les ennuis »
« Afin de rassurer son anxiété, elle chante »
A propos des papas
Une jeune fille a fugué à Tahiti, sa maman appelle la radio :
« Je te cherche en long et à travers »
« Le papa fait quartier en quartier »
Le BB et la maman sont partis 1 mois à Tahiti. Le papa :
« Je suis en congés de papa »
« J’ai eu 5 enfants et 2 filles »
A propos du sport
1ere course de Va’a (pirogues) depuis la crise sanitaire ; elle a lieu sans public. Elle est diffusée en simultanée en TV, en radio et sur le net :
« Ils ont dû s’arrêter, enfin quasiment ralentir »
Pendant la coupe de rugby à Tahiti, l’entraineur :
« On a des jeunes qui ont des gaz »
« La course ne va pas tarder à démarrer éminemment »
« La course s’annonce chirurgicale, voir comateuse, peut être stratosphérique »
« Les gens commencent à désemplir » (du stade)
A propos du confinement
« Le gel hydraulique »
« Le confinage collectif »
A propos de l’équipage
« Cécile est à la lunetterie » (l’opticien)
« Ton mari, il a l’appareil pour les apnées du sommeil ?»
« Non, et toi, tu l ‘as ? »
« Oui mais je ne supporte pas, ça m’empêche de dormir, alors je le mets la journée »
Un agent de l’hôpital central du Taone, à Tahiti, que le capitaine complimente sur sa tenue
« Si je mets des jolies robes, c’est pour les malades aillent mieux »
A propos des vivants et des morts
« Alzheimer, c’est la maladie qui vole les souvenirs »
« Je suis en situation plus ou moins handicapée, mais ça va »
« Je voudrais faire une dédicace de joyeux anniversaire à ma belle-sœur »
« Très bien, elle a quel âge ta belle-sœur ? »
« Elle est morte il y a deux ans »
« Il s’est fait enterrer dans son fa’apu ( terrain agricole) pour continuer d’entendre crier ses chiens »
« Merci au fond du cœur »
Le papa de la mousse est mort le 5 juillet. Elle est tellement triste que cela se voit…
« Tout le monde se joint à moi pour te serrer fort dans nos cœurs »
La mousse croise Adolphe, très cher Adolphe, la mousse lui fait remarquer :
« Je t’ai vu descendre de ta voiture, tu avais l’air fatigué »
Adolphe répond :
« Je t’ai vu aussi, je n’étais pas fatigué, je sais que tu es en deuil, j’avais mal pour toi, j’ai porté avec toi ton deuil »
« La pluie est passée quand ton papa est mort. C’est un signe. Maintenant, tu dois le laisser partir, ne plus être triste »
Et l’une de celles que l’équipage préfère…
« Je reste pas longtemps au téléphone parce que je vais regarder mes fleurs pousser"