Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »

Publié le par Equipage Contre-Temps

Sur le drapeau de Curaçao, il y a deux couleurs : le bleu et le jaune, qui désignent la mer et le soleil, et deux étoiles jaunes, avec autant de branches que d’origines ethniques des habitants de l’ile. La première étoile désigne l’ile mère « Curaçao », la seconde, sa petite sœur « Klein Curaçao » – « petit cœur » pour les intimes ! - joli petit bout de plateau corallien émergé à l’air paradisiaque, à peine à 24mn de Bonaire et 12mn avant la grande terre.

Pour fêter la fin de l’épisode munichois bonarien – oups ! - , Contre-Temps et bateau copain Kouunjitoujours compères - ont prévu une halte de 24h à Klein Curaçao – en toute illégalité puisqu’ils seront encore sans papiers officiels d’entrée, ça devient une habitude ! -

Les deux catamarans mouillent dans la bande des 60m d’eau turquoise avec 4m de fond, le cul à la limite du tombant de 30m, là où l’eau devient bleu marine !

Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »

La plage est bien épisodiquement envahie par quelques « tout blanc » qui débarquent par paquet de 12 de l’annexe d’une gros cata « traine couillons » comme on les appelle entre nous ! – c’est pas gentil, ça…  bouh ! que c’est vilain de  se moquer de ceux qui n’ont pas de bateaux ! – mais ce petit monde s’en va vers 15h, laissant aux deux équipages l’ile pour eux tout seuls et les tortues avec !

Le mousse en a plein les yeux : le tombant est magnifique, les coraux tous vivants et colorés, les tortues se laissent toucher la carapace – c’est pas bien de le faire mais quand même c’est simplement magique de s’y accrocher un petit peu et de se faire tracter par ces jolies demoiselles qui ne semblent pas du tout effrayées par nos paluches malhabiles ! - , le capitaine bullouille tranquille au milieu des petits poissons, et Sika est content, il a de nouveau une plage à chien  et a trouvé une nouvelle occupation : la chasse aux lézards !. D’ailleurs, après moultes efforts et courses poursuites gagnées haut la patte par les petites bestioles, il finira par en toper un, de lézard à pattes vertes irisées, que le mousse lui interdira de croquer, de peur d’une indigestion fatale pour l’état du trampoline qui, rappelez-vous, sert de chiottes au chien !

L’ile mérite donc qu’on s’y attarde un peu, même si la météo n’est pas folichonne : il y a le vent qui soulève la houle et les nuages qui se déversent matinalement – ce qui rince les ponts, remplit les réservoirs et arrose Sika chien ! – mais les bateaux sont bien accrochés, les équipages se sont jamais bien loin, et ils comptent sur une amélioration attendue pour le début de la semaine…

Et puis, c’est tellement bon de renouer avec la « Robinson attitude » qu’on décide de rester au moins 4 jours ici !

Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »

Parce qu’en clair, et s’en vous mentir, voilà l’environnement dans lequel les équipages évoluent …

Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »

Y’a vraiment de quoi se poser un peu, non ?

Donc, rituellement, comme sur chaque « terra incognita » déjà visitée, le chien matelot, le mousse et son capitaine partent faire le tour du caillou, à pieds. Ça tombe bien, il fait pas chaud – 20° au réveil, on s’avait même plus ce que cela voulait dire, c’est-à-dire, pour nous,  dormir avec un tee shirt ! –, on peut marcher tranquille sans suer comme des brutes ; on file cote au vent.

Cote au vent veut dire pas de plage mais des cailloux, des oiseaux qui pèchent, encore la marque poubellesque de notre civilisation et, ici, des épaves !

Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »

L’équipage en compte 5, des « très disloquées », des encore « en formes », toutes pillées, toutes tristes, toutes malheureuses …ça fait penser qu’on est peu de choses, que la mer gagne toujours, que ceux qui étaient à la barre ou à la passerelle, y ‘s ont raté leurs manœuvres, que peut être, y sont morts…que ça peut aussi être beau, un bateau la coque en l’air, les hélices qui rouillent, les herbes qui poussent dessus…et aussi effrayant…

Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »

Sur cette ile, il y a pourtant un phare, on pourrait même dire « un p… de grand phare », couleur framboise écrasée – y sont z’arbes ces hollandais ! - , massif, costaud, haut, qui arrose de sa lumière blanche, périodique et, aujourd’hui, mécanique, sur plusieurs miles nautiques à la ronde – en gros, il fait son boulot de phare, quoi ! –

Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »

Et ben, ça a pas suffit pour empêcher ça ! « En plein dans le mille, Emile », les deux plus gros bateaux sont échoués juste devant le phare !

Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »
Cahier de bord : Klein Curaçao « p…. touché mais pas coulé »

Fâcheries météorologiques de dame nature, panne mécanique, grève du zèle ou beuverie des gardiens de l’époque …. Va savoir Charles !

 

L'équipage finit de philosopher sur la grandeur et la décadence de la marine, et va se coucher, peinard, dans une cabine bien au chaud, aérée moyen parce qu’il pleut bien et qu’il faut choisir entre

  • avoir les pieds mouillés et respirer de l’air frais

Ou

  • être dans un sauna les pieds au sec !

On est dimanche, 5h du matin, je claque des dents et je monte le son ! euh non, pas du tout ! -  on est dimanche, 5h du matin, l’orage gronde fort et le vent se met à souffler plus que …. plus que les oreilles du mousse ne se sont habituées pendant la nuit… sursaut, alerte, réveil, sortie dans le cockpit pour « sentir »… Et ben y sent rien le mousse mais il entend les vagues sur les cailloux de la plage, bien plus près que depuis 3 jours et 3 nuits. Un éclair allume la nuit, c’est sûr, on est trop près et cul à la plage ! Le vent a viré plein ouest, n’importe na wouac ici mais c’est comme ça, il est plein ouest ! Fermeture de tous les hublots, secousse au capitaine qui dormait bien, lui, branle-bas, les moteurs sont mis en chauffe au cas où, la baille à mouillage est prête pour relever l’ancre …

Et là, comme ça, pour faire chier, la loi de Murphy frappe Contre-Temps  - pour les non-initiés c’est celle qu’on appelle aussi  « la loi de l’emmerdement maximum ! » -. ..

Au moment où on se dit qu’il faut dégager, on tape de l’arrière sur on sait pas quoi – sable ou caillou -, ça grince, Gagné ! : et là, cette p… de chaine ne veut pas remonter… et pour cause, la patte d’oie est prise sous la coque tribord! Re gagné ! : ça tire fort, il faudrait reculer pour libérer le bout mais les vagues poussent Contre-Temps à la cote, c’est pas le moment de leur filer un coup de main… Et on retape sur on sait toujours pas quoi, et ça re grince… Et re re gagné ! : il pleut des cordes, le capitaine s’agite à l’avant, gueule comme un damné et le guindeau finit par faire son boulot, la chaine remonte… Mais comme on a tiré comme des brutes sur la patte d’oie, la main de fer est faussée, impossible de la retirer…. Et re re re  gagné !

Il faudra :

  •  une pince rouillée,
  •  une lampe qui éclaire 5cm2,
  • un cutter qui coupe mal – sauf le pouce du mousse -,
  • 5 minutes de hachage menu menu du bout,
  • un passage à la main de la chaine dans le guindeau –puisque cette p… de main de fer est toujours cramponnée ferme à l’un des maillons de la chaine -,
  • et un Sika terrorisé qui ne sait plus où se mettre que dans les pieds de l’équipage – ce qui n’est vraiment pas, pour le coup, la meilleure idée que ce chien ait eu depuis qu’il est à bord ! –

pour dégager enfin de Klein Curaçao !

A 7h du matin, la pluie, la mer, le vent, et l’orage s’affaiblissent, Contre-Temps  a remis une patte d’oie « d’occasion » en service, a viré cette foutue main de fer pourrie et déjà maintes fois réparées et fait route, aux moteurs parce que bout au vent – ba voui, vent plein ouest !  -  vers Curaçao et Spanish Water – mouillage réputé comme hyper protégé -.

Il est suivi de Kouunji qui n’a rien compris au film mais que la houle grossissante rend méfiant sur la qualité du mouillage de Klein Curaçao pour les 24h à venir!

Résultats : après examens, juste un bel éclat dans l’antifouling au safran et une jolie trace de frottement à l’avant, coque Tribord, une main de fer toute tordue, une patte d’oie à refaire… pas grand-chose en somme !

 

Bon, d’accord, on a touché ce coup-ci, - pour ceux qui suivent pas, se rappeler des propos des « spécialistes » de Fountaine Pajot au sujet de la fuite d’eau dans la soute bâbord de Contre-Temps, réparée au soit disant chantier naval de Mindelo, Cap Vert !  -

 

Donc, touché – un peu  - mais pas coulé du tout! …

PS

L'équipage a beaucoup appris de cet "épisode":

  • de l'utilité d'avoir les bons outils au bon moment et au bon endroit,
  • à celle d'être toujours en situation de "prêt à partir",
  • en passant par la découverte de l'acquisition de sensations "marines" par le mousse
  • et par la concrétisation de la maxime si chère au capitaine (dixit) " bouges toi le cul et fermes ta gueule"!

Publié dans Cahier de bord

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E
C'est un régal de vous lire. Mort de rire...!<br /> Bien la &quot;maxime&quot; du Cap, Edwige me souffle à l'oreille qu'elle l'a bien connue aussi (Ah bon!?)<br /> Dicton Breton: &quot;Quand les mouettes ont pied, il est temps de virer de bord&quot;. Souviens t'en z'en.<br /> Bisous.
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M
Ouf! récit épique et conclusion autant, j'aime!<br /> Après, votre phare est en effet totalement phallique, il en est drôle...et ridicule! jusqu'où peut aller l'obsession du sexe masculin chez les constructeurs de phares? et encore, c'est parce qu'ils ne pouvaient pas fabriquer des boulles avec de briques!<br /> Enfin, la maxime du Cap est intéressante: et si c'était l'inverse? bouge ta gueule et ferme ton cul! à bon &quot;entendeuse&quot;! un peu vulgaire, mais si efficace!!!! besos, MH
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P
J'aime bien les maximes du Captain !!!
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